Chasse en Forêt

 

Il y a fort longtemps, s'étendait au pays de Tronçais, une forêt si vaste qu'elle constituait sans doute l'une des plus grande chênaie d'Europe. Le seigneur de cette contrée, le Duc des Bourbons, qui avait autorité sur l'immense et profonde forêt de Tronçais, avait un seul fils, Sieur Archambauds. Ce dernier aimait à chasser et ne manquait pas d'exaltation à poursuivre les sangliers, renards, chevreuils et autres gibiers qui peuplaient en abondance ces lieux. Un jour de chasse, surprit par la poursuite d'un grand cerf, lui et son plus fidèle compagnon se perdirent au cœur de l'immense forêt, si bien que le crépuscule venu, ils cherchaient toujours leur chemin. Alors que le soleil allait se coucher, ils aperçurent une modeste cabane tout prêt d'une fontaine. Comme il faisait déjà sombre, ils décidèrent de passer la nuit sur place en se relayant pour monter la garde. C'était une nuit idéale pour observer le ciel, les rayons de lune faisaient briller la cime des arbres, dessinant des formes énigmatiques. Archambauds se proposa pour prendre le premier tour de garde. Il s'assit sur une souche, à l'entrée de leur refuge, tandis que son compagnon épuisé, sombrait dans un profond sommeil. Il écoutait pensif les bruits de la nuit, quand soudain devant lui, d'étranges ruines apparurent toutes droites sorties de nulle part.

 

Elles semblaient là depuis une éternité, pourtant personne n'en avait jamais fait allusion. Le jeune seigneur avait bien entendu raconter que la source de Viljot cachait en ses profondeurs la cité engloutie de IO, pourtant cette ancienne légende ne suffisait pas à expliquer cette singulière apparition. Poussé par la curiosité, en dépit de ses craintes, il entreprit de se rapprocher avec précaution de ce lieu insolite. Il aperçut tout d'abord les ruines de ce qui lui sembla être une ancienne abbaye.


 


Il pouvait distinguer de chaque côté d'un long couloir, des salles avec d'anciennes cheminées, ainsi que de petits bancs de pierres adossés aux murs. Un peu plus sur la gauche, au ras du sol, il découvrit les fondations d'une chapelle entourées de multiples sépultures vestiges d'un ancien cimetière.
Cependant, ce qui attira le plus son intérêt fut un étonnant portail noir, en fer forgé, d'allure monumentale, qui se tenait un peu à l'écart et qui semblait ne pas avoir souffert des empreintes du temps.
Ses pas le conduisirent machinalement au pied de ce porche, sa main poussa la grille qui ne grinça pas, et il se glissa timidement dans l'entrebâillement comme attiré par une présence invisible. Le jeune homme se fondit durant quelques secondes dans une brume bleutée et froide et se retrouva sur une longue allée d'arbres centenaires entourée de champs. Il faisait encore nuit noire, la forêt avait totalement disparu. En regardant au bout du chemin, il vit une étrange lumière scintillante et bien qu'elle lui paraisse assez éloignée, il décida de marcher vers elle. Il suivit pendant quelques temps sa route qui le conduisit jusqu'à un lac tranquille et bleu. Il s'assit fatigué à proximité de l'eau, sur une pierre inclinée. C'est alors que lui apparut, tout d'abord confusément, puis toute à fait distinctement, la silhouette d'une femme. Elle se baignait nue dans la nuit, le visage tournait vers la lune. Elle était belle, d'une beauté inexprimable et surnaturelle… Sa longue chevelure noire, lisse et soyeuse lui tombait jusqu'au bas du dos, ses yeux d'un vert profond brillaient dans l'obscurité, d'un éclat incomparable, comme celui des étoiles filantes.



Sa peau était fraîche comme la rosée et semblait douce comme de la soie. Chaque courbe de son corps était la perfection. Dans le creux de ses seins, s'écoulait un léger filet d'eau. Il admirait son corps élancé et musclé nager dans l'onde claire. Le lac était calme et silencieux, pas un souffle de vent dans les branchages, pas un bruissement d'animal, aucune autre lueur que la splendeur de l'astre nocturne qui inondait ce corps. Soudain la naïade regarda le jeune homme droit dans les yeux et il sentit d'infimes frissons venir effleurer sa peau et l'envelopper de chaleur. Elle se pencha, prit un peu d'eau au creux de ses mains, les rapprocha des lèvres du jeune seigneur, puis, sans un mot, avec une infinie douceur, elle l'invita à boire. Ses lèvres frôlèrent ses mains aussi blanches qu'un rayon de lune et il sentit monter en lui une ivresse inconnue. Il savait que désormais son cœur lui appartiendrait à tout jamais. Cette nuit là, la pleine lune baigna le paysage d'une douce lumière argentée et elle caressa leurs corps enlacés d'un rayonnement magique.



Mais au petit matin, une brume légère se répandit sur le lac et la jeune damoiselle disparut.

Il essaya pendant des heures et des heures, de la retrouver, mais en vain. Il décida alors de rentrer chez lui. Il reprit la longue allée d'arbres par laquelle il était venu, jusqu'à atteindre l'imposant portail de fer forgé noir. Il le poussa sans encombre et se retrouva non loin de la fontaine qu'il avait quittée la nuit auparavant. Rien ne semblait avoir changé excepté les ruines qui n'étaient plus là, mais il ne s'en soucia pas. Il chercha des yeux la cabane, souhaitant y retrouver son compagnon mais elle avait disparu, elle aussi. Il faisait grand jour maintenant, sans doute son ami était-il rentré au château. Il hurla toutefois son nom, espérant entendre retentir le son de sa voix, mais seul l'écho lui répondit. Il marcha jusqu'au soir pour atteindre les abords de la forêt. Un vieux paysan était en train de labourer. Archambauds lui demanda le chemin du Château de Hérisson. « Le château de Hérisson » lui répondit le vieil homme «  Mais seigneur cela fait plus de 50 ans qu'il a été pillé. Il ne reste que pierres et du lierre. » Le jeune homme ne comprenait pas, alors le vieillard lui expliqua qu'après la disparition du jeune Sire Archambauds au cours d'une chasse dans la forêt de Tronçais, son père, le Duc des bourbons mit fin à ses jours et sa Majesté François Ier profita de l'occasion pour agrandir le Royaume de France . Le jeune châtelain se rendit en grande hâte sur les lieux de son enfance, mais quand il arriva, il ne restait que ruine et désolation. Le jeune homme épuisé s'écroula, il ne demeurait rien de son passé si ce n'est que quelques murs effondrés. On le vit tourner pendant prés de trois jours autour du château, puis il s'enfonça au cœur de la grande forêt et personne ne le revit plus jamais.



30/04/2008
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